Pac post-2027 : « pas de souveraineté sans préservation des écosystèmes »
Pour le Collectif Nourrir, la prochaine Pac doit passer par une souveraineté alimentaire envisagée sur le long terme, avec une redirection des aides Pac vers la transition agroécologique. La solution pourrait résider dans la diversification des exploitations et le développement des protéines végétales.
Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.
C’est une définition de la souveraineté alimentaire qui se veut sur le long terme. Mathieu Courgeau, coprésident du Collectif Nourrir voit dans la souveraineté alimentaire la « capacité à produire une alimentation choisie et durable pour tous, sans compromettre l’avenir ni l’agriculture des autres pays ». Cette vision doit être « mise au cœur de la Pac », a-t-il soutenu lors d’une conférence organisée par le Collectif Nourrir sur sa vision de la Pac le 18 juin 2025 à Paris.
Le collectif, qui regroupe 51 associations et organisations agricoles a transformé la Pac (politique agricole commune) en Paac (politique agricole et alimentaire commune). Une façon, pour ses membres, de montrer que l’alimentation, « ce n’est pas une marchandise, c’est un besoin vital ». C’est pourquoi « la Pac doit être réellement tournée vers la souveraineté alimentaire », abonde Nicolas Verzotti, agriculteur et président du réseau Civam, tout en ajoutant que « nourrir les autres ne doit plus signifier vivre dans la précarité ».
Trois propositions
Or, « il n’y a pas de souveraineté sans préservation de nos écosystèmes », ajoute Léo Tyburce, responsable du plaidoyer sur l'agriculture à WWF. Les enjeux environnementaux sont « aussi attachés à ceux de la souveraineté alimentaire ». Les aléas climatiques — de plus en plus intenses à cause du réchauffement — auront un impact sur les cultures. L’accès à l’eau, une ressource qui se raréfie, sera aussi modifié par des variations saisonnières et des différences territoriales. Et l’effondrement de la biodiversité, comme la baisse des pollinisateurs « vient menacer certaines productions » notamment en arboriculture, souligne-t-il.
En clair, sans protection de l’environnement, les pays de l’Union européenne risquent de ne plus pouvoir, à terme, être souverains dans leur production agricole, plaide le collectif. Alors que les premières propositions de la Commission européenne sur le cadre financier de la Pac sont attendues le 16 juillet, il porte trois propositions principales.
D’abord, « la régulation des prix et de marchés agricoles » via le renforcement du contrôle des autorités de la concurrence ou de prix minimums d’entrée sur le territoire national pour garantir un revenu agricole et éviter une concurrence infra-européenne. Ensuite, des aides « mieux ciblées sur des objectifs de transition » avec la fin des aides découplées à l’hectare et le soutien à la diversification. Enfin, le « développement rural et le renouvellement des générations » en encourageant des aides pour les jeunes agriculteurs et en évitant les « montages sociétaires [qui] captent les aides de la Pac », propose Ariane Richardot, chargée de mission pour les relations publiques du réseau Amap Île-de-France.
« On ne regarde que le produit fini »
Quand la souveraineté agricole est évoquée dans le débat public, « on ne regarde que le produit fini », déplore Léo Tyburce. Le plaidoyer de l'agriculture de WWF veut élargir cette notion à l’amont de la chaîne de production agricole.
Selon l’ONG, dans le système actuel, une production intensifiée comme en élevage nécessite une hausse de la consommation d’engrais et de protéines produites à l’étranger (soja, tourteau…), ce qui augmente la dépendance de l’Union européenne aux pays tiers et empêche d’asseoir sa souveraineté alimentaire et agricole.
Deux leviers consensuels
Face à ce dilemme, Aurélie Catallo, directrice de l'agriculture au groupe de réflexion de l’Iddri, propose de concentrer les réflexions autour de la prochaine Pac sur deux leviers agronomiques, pour résoudre l’équation : le développement des surfaces en protéines végétales et la diversification des ateliers au sien d’une ferme via le retour de la polyculture-élevage.
Dans un système en polyculture-élevage, le cheptel offre une ressource d’azote, limitant le recours aux intrants. Cette ressource peut être aussi retrouvée via la diversification des cultures avec l’ajout de protéines végétales fixatrices d’azote, qui servent à leur tour à l’alimentation du cheptel. Un cercle vertueux, qu’il faudrait encourager au niveau de la Pac, défend Aurélie Catallo. D’autant que ces deux leviers sur lesquels « des majorités se dessinent » permettraient aussi, de « dépolariser les débats sur la Pac », alors que deux visions simplistes « volume contre environnement » sont trop souvent opposées, analyse la directrice.
Pour accéder à l'ensembles nos offres :